Les lumières de Gsugat - 2

T. - Oui, Pfigome me disait de ne pas revenir, et ensuite elle était si flétrie et desséchée qu'elle s'est endormie et c'est son père, Gsugat, qui m'a pensé. 

I.  - Ah ! Et... il est aussi sévère que ton père à toi ? 

T. - Non, non ! Au coeur de sa sève, mon père n'est pas si sévère... Mais Gsugat, c'est autre chose... Il voulait toujours m'encourager à être plus soigné, ou moins timide, ou ceci ou cela. Aussi crampon qu'une boule de bardane ! mais toujours là quand on a besoin de parler.

G. - C'est un drôle de nom, Gssou-gatt ! Bon ! Tout ça, ça m'a donné faim ! Dis, Ifana, t'aurais pas quelque chose à grignoter ? 

 
I. - Oui, bien sûr ! Quand Maman fait les courses, elle ramène assez de provisions pour nourrir tout le quartier pendant plusieurs mois. Techet, toi aussi tu as faim ? Techet ? Hou hou ! Techet ? Tu es avec nous ?

	- Ah ! Gsugat ! tu me fortifies ! tes lumières me réchauffent. Mais je ne sais pas quoi répondre à Pfigome... Si seulement les souvenirs me revenaient ! - Tes souvenirs ne reviendront pas, Techet. Et Pfigome le sait. Dans son conte-message, elle raconte que, pour la protéger, tu avais fait le vide dans ta tête... - Ah oui, pour éviter que mon père ne récolte en moi la vérité, j'avais arraché de mes pensées "toute trace d'elle, jusqu'à sa silhouette".
	- Sans doute as-tu trop bien réussi... - Oui, après le crash de ma soucoupe, à cause du choc, je ne me souvenais de rien du tout. Feuille après feuille, le souvenir de mes parents et de Badjis m'est revenu, mais, jamais je n'ai eu un souvenir, même pas un brin d'herbe, sur Pfigome. Alors, euh... Pfigome, comment pousse-t-elle ? - Pfigome ne voudrait pas que je te le dise, mais comme toi, il fallait qu'elle éclose au-delà de votre aventure, qu'elle se projette hors de votre histoire. - Comment ça ?
	- Pendant toutes ces saisons où nul à TunT2 n'avait de nouvelles de toi, Pfigome s'est ligaturée elle-même par une espèce de serment, un serment qu'elle et toi, vous n'aviez pas eu le temps de prononcer. - Mais aujourd'hui, c'est fini ? Cette branche-là ne donnera plus de fruits ? - Je le crois ainsi. Pendant longtemps, Pfigome se serait sentie coupable de t'abandonner, mais depuis ton retour, aujourd'hui, je la crois soulagée de savoir que son hibernation, son interminable attente est enfin terminée.

T. - Et à moi aussi, ça m'a fait du bien d'entendre ça, parce que cette osmose avec Pfigome, ça me met mal à l'aise. Tourbe ! je ne m'en souviens pas, moi ! j'ai l'impression qu'on me raconte la vie de quelqu'un d'autre !

G. - Moi, ça ne m'étonne pas ! Ca s'est passé il y a hyper-longtemps ! Vous auriez pu rompre dix fois depuis !

T. - Tu... tu crois ?

I. - Attention, Gaia ! Tu vas encore le faire flipper !
Mais je suis d'accord ! votre histoire était exceptionnelle, ce conflit avec ton père vous avait rapprochés, mais toutes les histoires peuvent se terminer, même les plus belles...

G. - Mais dis-donc, toi... On dirait que tu es une pro de la rupture ! Je ne pensais pas que tu avais autant d'expérience !

I. - Eh ! Je ne te dis pas tout ! Bavarde comme tu es !

G. - Si je comprends bien, Techet, le conte-message, Pfigome te l'aurait transmis d'abord pour faire le point avec elle-même...

I. - Oui, pour se libérer du passé, pour pouvoir prendre un nouveau départ... En tout cas c'est ce que je vais mettre dans le devoir pour Filbert.

G. - Eh ! T'as pas le droit ! J'ai eu l'idée la première ! Techet, s'il te plaît, empêche cette vilaine fille de me voler mon idée !







 Pendant ce temps-là, chez Clea...

	- Bien le bonjour, Clea ! je suis fort aise de te trouver au logis ! - Oh ! Mais qui voilà ! Maître Melric Thulag en personne ! Quel bon vent vous amène, Monsieur le Maire ?		- Tu ne crois pas si bien dire ! Car c'est ma charge de Maire qui a conduit mes pas jusqu'à ton huis ! Il me faut vous parler, à toi et Techet, lui peux-tu enjoindre d'approcher ?
	- Je l'ai envoyé faire une course, il devrait être rentré, d'ailleurs ! Euh... J'espère qu'il n'a pas renversé votre poubelle ou... comment dire... souillé votre haie ? - Nenni, nenni... - Voulez-vous entrer pour l'attendre ?		- Non, je ne puis m'attarder davantage. Ah, ce contretemps est furieusement fâcheux... Voici ce qu'il en est: vous êtes requis d'assister, Techet et toi, à la prochaine séance du Conseil Communal.
	- Mais on dirait... une convocation officielle ! Mais pourquoi ? Qu'est-ce qui se passe ? - Ah ! Clea ! Ne me tourmente pas plus outre ! Je ne puis rien révéler en dehors du Conseil, hormis que l'affaire est de grande conséquence !		- Entendu, Melric... Puisqu'il le faut, nous viendrons, mais sachez-le, je n'apprécie pas du tout ces cachotteries ! Et je le proclamerai devant le Conseil tout entier !

Chez Ifana, la conversation continue...

T. - Alors vous pensez vraiment que Pfigome, quand elle me dit de ne pas revenir à TunT2, en fait, elle veut que je continue à prospérer ici avec Nicole ?

G. - Ah là, je trouve que tu lui en demandes beaucoup ! Décidément, les mecs ! Tous pareils ! Ils ne pensent qu'à eux !

I. - Je crois plutôt que pour Pfigome, te dire de ne pas revenir, c'est sa façon à elle de terminer votre histoire, et pour elle, et pour toi.

G. - Ca aurait peut-être été plus simple de ne rien lui raconter du tout, non ?

I. - Si tu mets cette idée-là dans ton devoir, ça m'étonnerait que tu aies une bonne note !

T. - Quand Pfigome continuait à m'attendre, alors que moi je l'avais oubliée, elle aussi se sentait coupable... Grâce à elle, je comprends mieux qui je suis, et grâce à mon regain, elle se sent délivrée... Nom d'un suc ! Oui, c'est possible !

G. et I. - Voilà !
I. - C'est ça !
G. - Il a compris !

T. - Et ensuite, Gsugat a parlé de nos destins, à Pfigome et à moi, c'est folâtre, Frof aussi me parle du destin parfois.

I. - Ah ! Frof ! Il faut que je le remercie, il m'a dit que je pouvais aller chez lui quand je voulais pour m'exercer sur son piano. Mes parents, ils ne veulent pas louer un piano, ils disent que c'est pas un vrai métier et que je ferais mieux de revoir mes leçons. Alors mon destin, je voudrais bien que ce soit la musique, mais...

G. - Moi, je voudrais faire de la natation, mais j'hésite: dès que je me mets en maillot, il y a toujours au moins trois mecs pour me mater en ricanant, alors...
Euh... Je dis pas ça pour toi, Techet !

T.- Non ! Non ! Ne te noue pas !

I. - Et mon frère, j'espère qu'il te laisse tranquille ! J'en ai marre qu'il drague mes copines !

G. - Oh ! Patteo, il est pas méchant, il est... un peu lourd, mais pas méchant. Et lui, il serait plutôt du genre à préférer m'imaginer en maillot qu'à me voir en vrai ! Hi hi !

T. - Les filles, je crois que je vais vous laisser, vous...

I. - Ah non, Techet ! Assieds-toi !

G. - Tu vas pas recommencer !

I. - Dis donc, dès qu'on arrête de s'occuper de toi une seconde, ça y est, tu veux te sauver !

G. - T'es drôlement exigeant, tu sais ! Et puis tu nous as promis ! Tu dois la finir, ton histoire !

I.- Et là, j'ai suivi ! Gsugat te parlait de ton destin. Et toc ! Je les aime pas ces chaises ! Vous venez, on sera mieux dans la bibliothèque.